Les écoles, les courants sont tombés en désuétude. Longtemps, la littérature française a été le terrain d’affrontement de divers mouvements. Les naturalistes maudissaient alors les décadents. Le Surréalisme triomphait en excommuniant ses détracteurs, tandis que Dada se sabordait pour convaincre. Aujourd’hui ne subsistent plus de cette Atlantide que les ruines de revues où l’on se regroupe par cooptation, sans plus se soucier d’idéologie ou d’esthétisme.
À mesure que les organisations politiques et syndicales perdaient de leur crédit, les écrivains renonçaient progressivement à une littérature de parties. La foi en un avenir meilleur disparaissant, ce sont tous les dogmes qui furent mis au rebut.
À l’instar du Pont-neuf, qui se trouve être le plus vieux pont de Paris, le Nouveau Roman, comme son nom ne l’indique pas, est bien le dernier de ces grands mouvements pachydermique. Il était alors question de subvertir la forme de l’intérieur, de revêtir les oripeaux du roman pour mieux le transformer. Cette stratégie n’est d’ailleurs pas sans rappeler la technique appliquée par les groupuscules trotskystes, noyauter le système pour le changer ou le détruire. Bien évidemment, le Nouveau Roman se voulait une révolution, comme tous les autres courants avant lui. Il pensait mettre un terme aux querelles intestines du monde littéraire en les rendant obsolètes. Sa doctrine consistait à professer l’absence de doctrine.
Ce mouvement sans descendance fait aujourd’hui figure de curiosité. Reste bien les Éditions de minuit qui, tout en défendant une littérature exigeante, me donne parfois l’impression d’être une secte. La similitude avec le trotskysme ne s’arrête pas là. Jospin est devenu Premier ministre et Robbe-Grillet est entré à l’Académie française. Le premier, je crois, n’a pas subverti grand chose, quant au second, il imagine sans doute pouvoir dynamiter la maison de retraite en refusant de porter l’habit vert. L’entrisme aussi a ses limites. Les concepts en « isme » sont devenus des isthmes séparant les rêves de la réalité. Même si l’on y prend garde, c’est le monde imparfait qui finit par nous changer.
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