On pourrait croire que la Littérature est un espace de liberté, où les auteurs batifolent au gré de leurs envies, où l’extravagance règne en maître.
On pourrait croire que les artistes, en règle générale, bénéficient d’un régime de faveur, échappant ainsi à la répression et au paternalisme.
Détrompez-vous ! Il existe en réalité peu de milieu aussi dogmatique. Les censeurs et les despotes de tout poil s’y retrouvent en masse. Ils prêchent leur credo avec véhémence, jusqu’à ce que la leçon soit bien assimilée. Le comportement du dompteur doit être standardisé, le geste reproductible, parfaitement identifié, car c’est la normalisation qui est l’enjeu du pouvoir. Si j’arrive à t’imposer mes codes et mes valeurs, alors tu deviens au mieux mon débiteur, au pire, ma groupie. S’il n’existe pas encore de méthodologie pour tes brouillons, on en rédigera une, car il faut s’y prendre à la source. Le conseil révèle soudain sa véritable nature.
Ainsi l’indépendance est matée, la subversion étouffée dans l’œuf. Le champ d’expression des folies sociales subit donc aussi les pesticides. On élague ses arbres, on calibre ses fruits. Pourquoi faut-il que ce dernier pré carré subisse à son tour les ravages de l'industrie ? Soumettre une nature déjà domestiquée ne procure en effet aucune gloire, tandis que l’exercice du potentat nécessite en permanence de nouveaux défis, de l’exotisme, une certaine résistance…
La littérature est le dernier challenge des tyrans en retraite.
Pour ces maréchaux et leurs valets, maintenir leur influence consiste essentiellement à distribuer subsides et châtiments. Comme chacun sait, la récompense du courtisan est alors garantie d’immobilisme. Pour les autres, le bannissement et les gémonies feront office d’anathèmes.
Reste seulement à courber l’échine, le temps de se faire oublier, disparaître !
Faire semblant vous dis-je et fomenter dans l’ombre quelques noirs complots…
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