La perspective du texte qui croît, comme la marée qui monte inexorablement dans la Chambre d’amour. C’est la terreur absolue de la noyade teintée d’une étrange volupté. La possession, encore, encore. Il faut s’y résoudre, vomir et trembler de trouille. Elle revient toujours cette lame qui vous fauche et vous transfigure. On ne s’y attend pas. On l’espère jusqu’à l’oubli et puis lorsqu’elle est enfin là, on prétend lui échapper.
Aborder un nouveau roman, cette autre terre qui se développe et s’impose comme ces îlots volcaniques d’Islande, poussés dans la nuit, bruts et noirs, tout frémissant d’écume et de vapeur, c’est prendre le risque.
On arguera, comme les détracteurs de Sartre, que scribouiller des feuillets n’a jamais tué personne et que seul l’engagement physique au service d’une cause force l’admiration. Mais se débattre avec l’intime et présenter ainsi un canevas tissé de rêves provoque chez l’aspirant tous les symptômes qui précèdent le combat.
Il faudra donc louvoyer, une fois de plus, entre les bretteurs du style et les trous noirs, preuve que le compromis est non seulement possible, mais en réalité indispensable. La littérature n’est pas dans une ornière. Elle survit et trace son chemin en dépit des funérailles que les médias et les critiques lui offrent chaque semaine en grande pompe. Tant qu’il y aura des gens pour y croire et s’atteler à la tâche, elle fera preuve de vigueur, loin des certitudes et des ors. Il suffira que les petits, les sans grade, les anonymes, les lecteurs, les songeurs, continuent de s’interroger.
Je doute et c’est déjà pas mal !
Commentaires