Henri Cartier-Bresson s’est un jour déclaré très influencé par la lecture d’un livre paru pour la première fois en 1948 et intitulé Le Zen dans l’art chevaleresque du tir à l’arc. Dans cet ouvrage autobiographique, Eugen Herrigel, alors étudiant en philosophie, part vivre au japon afin d’y étudier le bouddhisme. Au lieu de se consacrer directement à l’abstraction philosophique, il se tourne vers le tir à l’arc, ou Kyudo, et décide de s’en servir comme support à sa propre réflexion sur l’orient.
Dans le Daishadokyo, courant mystique du kyudo, il s’agit pour l’archer d’être l’arc et la flèche aussi bien que la cible. On cherche avant toute chose à s’atteindre soi-même, sans plus se soucier de performances techniques. Viser ne sert à rien. Le regard tel qu’on le conçoit généralement devient inutile, si bien que les pratiquants décochent souvent les yeux bandés, entre tension du geste et relâchement complet.
On voit bien comment l’analogie entre photographie et tir à l’arc put séduire Cartier-Bresson, mais au-delà des similitudes dynamiques, ce récit fut pour moi une véritable révélation, liant pour la première fois activité physique, démarche esthétique et recherche spirituelle. L’écriture se prête tout aussi bien à cette interprétation du monde où l’OBJECTIF, polysémie heureuse, doit être ignoré pour être atteint. Rien de pire en effet que se fixer un but duquel on finira immanquablement par dévier. Le geste a son mouvement propre qui contraint la trajectoire et sa déchéance balistique. C’est entre spontanéité et recul, inconscient et réflexion que je cherche à tirer mes salves. J’exerce une influence raisonnée jusqu’au maximum de tension, jusqu’au point de rupture, avant d’accepter une certaine forme d’abandon non seulement inévitable, mais en définitive souhaitable. Composer avec la vision par le geste.
Au fil des années, j’ai offert ce livre à plusieurs reprises me heurtant toujours à une incompréhension totale, mais comme l’a écrit Shakespeare dans le Roi Lear : « Mieux vaut mourir incompris que passer son temps à s’expliquer ».
Eh bien tu sais quoi? Je viens de comprendre ce qui s'est passé. J'ai pommé ma carte bleue dans un de ces jolis bars alpins où les anglais & autres skieurs viennent faire la bringue & depuis j'ai toujours pas reçu la nouvelle. Le numéro ne marche donc pas. Tout ça est très bien, ça me permettra de le commander par ton site dès vendredi... si je reçois enfin cette foutue carte!
Rédigé par : Lazare | 07 février 2008 à 16:13
@Lazare : Comprends pas ce qu'y foutent chez Amazon (en plus, ils en ont en stock) Il est noté dispo partout, Electre et Dilicom. T'aurais dû le commnander par le lien en haut à gauche...je te l'aurais dédicacé...mais je suis sûr que tu sera beaucoup moins indulgent que Juliette...
Rédigé par : Mikael | 06 février 2008 à 12:48
J'aimerais en dire autant mais voilà bientôt deux bon mois que je bataille avec amazon pour avoir enfin mon Omicron maison. Je veux bien habiter dans un trou mais quand même! Sinon, le zen est une des activité principale de la Bruyantissime... ça soigne des albums de John Zorn!
Bien à toi.
Rédigé par : Lazare | 06 février 2008 à 10:43
@Juliette Mezenc
Merci à vous pour ces encouragements qui me touchent tout particulièrement!
Rédigé par : Mikael | 05 février 2008 à 17:00
c'est drôle, régulièrement vos posts me rappellent des lectures qui ont été décisives, fante et puis maintenant Le zen...ce bouquin m'avait fascinée mais je ne l'ai plus, faudra le racheter... j'ai pris aussi beaucoup de plaisir à lire Omicron, tour à tour amusant et virtuose, j'ai personnellement particulièrement aimé ce passage où le narrateur sort de la zone morte et parvient sur "des trottoirs striés de noir et blanc", où il évolue sur le blanc de la carte, sur "les lignes que forme le vide entre les lignes". Magnifique sortie ! Merci.
juliette
Rédigé par : juliette mézenc | 05 février 2008 à 16:49