Paris Hilton serait-elle un personnage inventé par Marcel Aymé ?
C'est l'insolente question que l'on devrait se poser en visionnant pour la centième fois La Traversée de Paris, tant les similitudes entre la blonde héritière et Grandgil, interprété par jean Gabin, sautent enfin aux yeux. Les déambulations nihilistes du premier ressemblent à s'y méprendre à celles de la seconde. Le règne moral de Bush en lieux et place du couvre-feu de la zone occupée. L'aisance matérielle en temps de crise confère une impunité totale aux deux protagonistes. Le temps et l'espace qui les séparent ne changent pourtant rien à cet axiome. Les héros anarchistes qu'affectionnait tant l'auteur d'Uranus et du Passe-muraille traquent le bourgeois et ses vices, la mentalité paysanne aussi bien qu'ouvrière, la petitesse d'esprit.
Si The simple life est un spectacle éminemment subversif, c'est parce qu'une gosse de riche y détruit méthodiquement les valeurs qui fondent le contrat social de l'occident capitaliste. « Ceux qui se lèvent tôt » y sont ramenés de manière systématique et désinvolte à l'état de cloportes anonymes et interchangeables, survivant dans la terreur et l'abrutissement de lendemains étriqués. D'où vient alors ce sentiment qu'une émission de télé-réalité, animée qui plus est par une bimbo décolorée est en fait un programme punk ?
Miséreux et milliardaires se rejoignent dans leur absence totale de peur, leur détachement face aux vies besogneuses et prétendument méritantes. Ne rien avoir à perdre équivaut à se sentir au-dessus des lois.
On pourrait donc ainsi tracer une filiation mêlant personnages de fiction et personnages « réels », qui commencerait avec le Boudu de jean Renoir et, passant aussi bien par Sid Vicious que la Collection blanche, se terminerait de manière improbable et sans doute involontaire sur MTV.
En tous cas, quel bonheur de voir foulé au pied tout ce qu'il nous faut respecter par crainte de l'avenir !
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